Introduction
Lorsque la Belgique devient indépendante en 1830, très vite germe l’idée d’établir un réseau de chemins de fer avec pour point central, non pas Bruxelles, mais Mechelen (Malines).
La loi de 1834 - Nr. 330 - dit dans son article 1 : “Il sera établi dans le royaume un système de chemins de fer ayant pour point central Malines, et se dirigeant vers l’est vers la frontière de Prusse par Louvain, Liége (orthographe de l’époque) et Verviers; au nord par Anvers; à l’ouest sur Ostende par Termonde, Gand et Bruges, et au midi vers les frontières de France par le Hainaut.”
Notons, que John Cockerill avait déjà un projet de chemin de fer entre Bruxelles et Antwerpen (Anvers) en 1829, projet refusé par le Roi des Pays-Bas, alors régnant sur ce qui allait devenir la Belgique.
Concernant la ligne vers l’est, le problème est la différence d’altitude de 110 mètres entre le plateau hesbignon et la ville de Liège tapie dans la vallée de la Meuse. Trois tracés sont proposés et finalement, est retenu le tracé via Ans et ce qui allait devenir les plans inclinés de Liège, un obstacle compliqué à franchir pour l’époque. Arrivée du chemin de fer à Ans
Le problème des plans inclinés de Liège continuera longtemps à occuper le débat et les tracés proposés vont se succéder, certains desservant directement le centre de Liège, comme ce projet de 1832 dit “Beaulieu” qui prévoit une gare “centrale” en Avroy. Il n’en sera rien, comme nous le savons, la gare principale de Liège sera finalement établie dans le quartier des Guillemins.
Toujours est-il qu’en 1838, le 2 avril exactement, le chemin de fer est arrivé à Ans dont la gare est nommée “Liège-Supérieur”. Il n’y a que deux trains de voyageurs par jour au départ d’Ans en 1840 et le transport des marchandises reste malaisé.
Le problème du franchissement du dénivelé reste provisoirement sans solution et les locomotives de l’époque ne sont pas assez puissantes pour l’affronter.
Henri Maus, par qui le train put arriver à Liège
Une fois le second tracé des ingénieurs Simons et Deridder entériné, c’est à un brillant ingénieur des “Ponts et Chaussées”, Henri Maus, que fut confiée la délicate question de solutionner le problème technique que posait le plan incliné. Ce qu’il fit de manière magistrale avec le concours d’Hubert Brialmont grâce à une machine à vapeur fixe située au milieu du plan, une prouesse inouïe pour l’époque !
Cette machinerie, par un système de poulies, va actionner des câbles sans fin qui vont permettre aux trains de gravir le plan incliné. A noter que le tronçon, fait rare pour l’époque, était d’office à double voie et l’on circulait à droite. La raison de tout cela : la machinerie se trouvait à l’extérieur de la courbe du Haut-Pré, ainsi pour ne pas la mettre en péril en cas de problème, on construisit une voie en cul de sac à droite (dans la courbe intérieure) pour stopper les trains qui seraient arrivés à vitesse excessive dans la descente.
Cette machinerie resta en service jusqu’en 1866 pour les trains de voyageurs et 1872 pour les trains de marchandises.
Pour qui veut en savoir plus, voici un lien vers un article publié dans “le Rail” (périodique des œuvres sociales de la SNCB) : Article sur les plans inclinés de Liège dans la revue le Rail (clic droit pour ouvrir dans nouvel onglet ou fenêtre)
L’allègement des trains dans les années 1980
Si aujourd’hui, les rames tractées franchissent sans problème le dénivelé des plans inclinés, il n’en a pas toujours été ainsi, comme nous l’avons-vu.
Lorsqu’il fut décidé d’accueillir les TGV en gare de Liège-Guillemins, une nouvelle gare fut construite quelques dizaines de mètres plus loin que l’ancienne, vers la Meuse allongeant la distance avant de s’engager sur les plans et cette modification de l’infrastructure conjuguée à la puissance du matériel actuel, il n’est plus nécessaire d’alléger les trains (pendant un certain temps, l’allègement était prévu en cas d’intempéries hivernales).
Les automotrices, dont les moteurs de traction sont répartis sur toute la rame ne nécessitaient pas d’être “allégés”.
Lorsque j’étais adolescent et encore au début de ma carrière dans le “roulant”, l’allègement des rames tractées était toujours d’application et faisait l’objet d’une procédure de départ spécifique qu’il fallait connaître (tant pour le personnel de conduite que celui de l’accompagnement).
Une locomotive électrique a longtemps été affectée à cette tâche, la 2383 ; elle était équipée spécialement pour cette tâche avec notamment des buttoirs élargis pour éviter le chevauchement avec ceux des voitures qu’elle poussait. Parfois, une autre machine devait être affectée à la tâche.
Lorsque la la locomotive d’allège est positionnée contre le train
Extrait de la réglementation des années 1980:
Lorsque la (les) locomotive(s) de pousse se trouve(nt) en position correcte pour alléger le train, le conducteur de la locomotive attenant au train avise le chef de gare en actionnant l’interrupteur de l’un des dispositifs échelonnés sur le quai.
La lampe blanche “Allège” s’allume sur les boîtiers de commande tandis qu’une lampe témoin indiquant que l’information à bien été transmise s’allume à proximité du dispositifs que le conducteur a actionné.
La procédure de départ
Extrait de la réglementation des années 1980:
Pour tous les trains poussés, tant voyageurs que marchandises, l’indicateur « Opérations Terminées » (IOT) est manœuvré par le sous-chef de gare qui s’assure au préalable :
- de l’allumage de la lampe blanche “Allège” signalant la présence de la locomotive de pousse à l’arrière du train;
- de l’allumage de la lampe clignotante;
- de la terminaison des opérations, en s’informant auprès du chef de train.
L’allumage des feux blancs de l’indicateur constitue l’autorisation de démarrage de la locomotive de pousse.
Intervention des locomotives
Extrait de la réglementation des années 1980:
La locomotive de pousse met seule le train en marche au vu des feux blancs de l’IOT. Sa force de poussée est à limiter suivant la charge du train sans dépasser le tiers de l’effort maximum.
L’effort de poussée maximum ne peut être produit qu’après le dépassement par la locomotive de pousse, du dernier aiguillage de l’itinéraire vers la voie principale. L’effort de traction de la locomotive de remorque est limité de façon à ne pas dépasser la vitesse de 30 km/h dans les aiguillages de l’itinéraire de sortie de la gare. L’effort de traction peut être porté progressivement au maximum à partir du signal d’arrêt B990.
Le décollement avait lieu à la BK 95.430 à hauteur du pont de la rue Jean Jaurès.
Une courte vidéo réalisée pendant ma formation montre le moment où la locomotive d’allège décolle : Vidéo du décollement de l’allège (clic droit pour ouvrir dans nouvel onglet ou fenêtre)
Il existait toute une réglementation spécifique en cas où l’allège était accrochée, si il y avait décollement accidentel, …
Notons aussi que le personnel de train devait être attentif dans la descente afin d’éventuellement actionner les freins d’urgence et à vis s’il devait y avoir défaillance des freins de la rame. De mémoire, ça ne s’est jamais produit.
Conclusion
Une page d’histoire ferroviaire belge est maintenant tournée mais elle laisse de nombreux souvenirs à l’adolescent que j’étais et qui passait ses dimanches après-midi à regarder les trains (je ne les photographiais pas à l’époque).
Si vous souhaitez voir l’ambiance de l’ancienne gare de Liège-Guillemins, j’ai trouvé cette vidéo sympathique : Liège-Guillemins en 1996 et 2003 (clic droit pour ouvrir dans nouvel onglet ou fenêtre)
Bibliographie
- Contribution à l’histoire des plans inclinés de Liège, Jean-René Lejeune, éditeur, 1992
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